Un printemps 2017 citoyen contre l’impunité du groupe Monsanto
Le mois d’avril 2017 a permis un véritable dialogue citoyen. Le 18 avril à La Haye, le Tribunal Monsanto a donné son avis sur l’impact négatif des activités du groupe Monsanto par rapport aux droits fondamentaux et aux droits de l’environnement. En parallèle, l’Assemblée des Peuples, mouvement mondial actif depuis octobre 2016, a mené plusieurs actions contre les groupes agro-industriels comme en avril en Allemagne.
La juge Françoise Tulkens témoigne de l’action du Tribunal Monsanto
Une procédure citoyenne d’envergure
Ouvert depuis octobre 2016, à La Haye, le Tribunal Monsanto est une procédure citoyenne d’envergure internationale. L’objectif est de mettre en évidence les manquements et les violations que commettent, sur les droits humains et la nature, les groupes agro-industriels dont au premier plan desquels se trouve le groupe Monsanto. Depuis le début du XXe siècle, ce dernier a commercialisé des produits très toxiques qui ont contaminé l’environnement sur le long terme et rendu malades ou causé la mort de milliers de personnes dans le monde : nous pouvons penser aux pesticides PCB (qui jouent sur la fertilité humaine et animale), le 2,4,5 T (reconnus pour favoriser les malformations congénitales et le cancer), l’herbicide lasso (désormais interdit en Europe) et le désherbant hautement polémique Roundup.
Pour reconnaître les crimes de l’entreprise, 5 juges internationaux (Eleonora Lamm, Steven Shrybman, Jorge Abraham Fernández Souza, Dior Fall Sow, et Françoise Tulkens) ont écouté les témoignages de victimes et d’experts. Suivant la règle de la Cour Internationale de Justice, ils ont donné un avis consultatif sans appel le 18 avril dernier à La Haye.
Vers une reconnaissance des crimes commis
Les conclusions de ce tribunal extraordinaire reconnaissent que les activités de la firme vont à l’encontre des droits humains fondamentaux et dénoncent l’écart terrible qui existe entre les droits des multinationales et leurs obligations. Les juges ont lancé un appel pour que le droit protège mieux les victimes des entreprises agro-industrielles. Plus précisément, les juges ont reconnu la culpabilité du groupe Monsanto vis-à-vis du droit à un environnement sain, du droit à l’alimentation, du droit à la santé et du droit à la liberté permettant d’effectuer des recherches scientifiques fiables par exemple.
Le crime d’écocide a également été mis en avant lors de cette procédure. Les juges ont ainsi reconnu que si le crime d’écocide était reconnu dans le droit pénal international alors les actions de la firme seraient condamnées. En savoir plus sur l’écocide. Les juges soulignent ainsi le nécessaire développement d’instruments permettant de protéger la nature. Ils sont même allés plus loin, montrant le terrible fossé qu’il y a entre les déclarations et les actions réelles pour protéger l’environnement.
Pour finir, les juges appellent à la nécessité d’affirmer la primauté des droits de l’Homme et de l’environnement à l’international par rapport aux règles juridiques de protection des investisseurs mises en place par l’Organisation Mondiale du Commerce et dans les traités d’investissement bilatéraux et de libre-échange. De telles règles empêchent le plus souvent d’agir et bloquent les actions juridiques contre les entreprises. Les litiges sont alors résolus par des tribunaux privés opérant hors du cadre onusien.
N’ayant qu’un avis consultatif, les conclusions du Tribunal Monsanto ne donnent pour le moment aucun moyen de sanction vis-à-vis de la firme, mais qu’une telle procédure ai pu être mise en place aujourd’hui est la preuve d’un changement notable par rapport aux décennies précédentes. Il faut accompagner ce changement, en renforçant le poids de l’opinion publique afin que des groupes agro-industriels fautifs soient poursuivis et que leurs crimes soient reconnus et sanctionnés.
Une mobilisation internationale en actions
En marge du Tribunal Monsanto, l’Assemblée de Peuples a été mise en place pour favoriser un dialogue public sur les stratégies possibles pour contrer les problèmes causés par les entreprises agro-industrielles et sur l’avenir durable. Ce rassemblement composé de mouvements internationaux et d’acteurs de la société civile engagés (mouvements agricoles, groupes environnementaux, organisations étudiantes…) reçoit un soutien important de plusieurs ambassadeurs comme Manu Chao, Nnimmo Bassey ou Richard Falk.
¨Seeds of Freedom¨ par Manu Chao pour le Tribunal Monsanto
Plusieurs actions ont été mises en place par l’Assemblée dans ce sens comme celles qui se sont tenues à Bonn et à Cologne (Allemagne) du 25 au 29 avril 2017 contre la fusion opérée entre l’industriel allemand Bayer et Monsanto. Plus précisément à Bonn, le mouvement a manifesté devant le World Conference Center où se tenait l’Assemblée générale du groupe Bayer. La mobilisation s’est poursuivie par une conférence de presse.
La fusion entre les deux groupes de l’agro-industrie interpelle et inquiète comme l’explique Navdanya, notre partenaire en montage de projets terrain et actions de plaidoyer. En effet, l’intérêt de Bayer et Monsanto est le profit à tout prix ce qui mène à des conséquences néfastes et des dérives : ouvrant de plus en plus les marchés, faisant pression sur les élections, prônant la dérégulation des barrières commerciales, imposant à certaine communauté l’achat de graines génétiquement modifiées, souvent non reproductibles et l’usage de pesticides.
La lutte contre l’impact négatif des groupes agro-industriels sur les droits de l’Homme et de la Nature est constante comme le montrent l’engagement et le soutien constant de l’association SOL et de ses partenaires contre ces pratiques. C’est grâce à ces mobilisations que nous pouvons faire changer les choses, avec par exemple la création d’un tribunal citoyen jugeant des entreprises allant à l’encontre du bien-être de la société. Prenons part à ces mobilisations et participons en tant que citoyen à la création de notre futur.
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