Des nouvelles du projet Graines de l’Espoir
Mars 2017
Depuis 2011, SOL et son partenaire local, Navdanya, appuient en Inde le projet « Graines de l’Espoir ». Après une première phase du projet qui a permis d’obtenir des résultats très positifs, une deuxième phase a débuté en octobre 2015. Ce projet a pour but de développer l’autonomie économique, alimentaire et la résilience aux changements climatiques des petites communautés paysannes de la vallée de Dehradun, en Uttarakhand, au nord de l’Inde. Près d’un an après son démarrage, voici un premier bilan des activités menées.
Renforcement de la résilience face au changement climatique
237 paysannes en plus des 486 paysan.ne.s de la première phase ont suivi des formations à l’agroécologie pour enrichir leurs techniques de culture et favoriser une agriculture locale respectueuse de l’environnement. Grâce à ces formations, elles gagnent en autonomie alimentaire de par la production de leurs jardins potagers. De plus, certaines arrivent à produire plus qu’elles ne consomment et les surplus sont vendus dans les villages ou sur les marchés locaux. Un autre résultat notable est qu’elles ont toutes augmenté le nombre de plantes qu’elles cultivent (au minimum 9 variétés par saison), ce qui représente une augmentation de 17 % de la diversité des espèces cultivées.
De plus, les 486 paysan.ne.s bénéficiaires (dont 95 % de femmes) de la première phase continuent d’être appuyés suivant leurs besoins.
C’est le cas de Mangleshwari, originaire du village Ratampur, qui a rejoint le projet « Graines de l’Espoir » lors de sa première phase, de 2011 à 2015. Grâce au projet, elle est maintenant autonome pour sa production alimentaire et céréalière et cultive 100 % de sa production selon les principes de l’agroécologie enseignés par notre partenaire local Navdanya. Elle explique :
« J’ai emprunté une petite somme au groupe d’entraide que j’ai rejoint grâce au projet et j’ai pu commencer à louer un espace de vente. Maintenant j’y vends mes fruits et légumes tous les jours. Au début, c’était un peu compliqué, les clients ne me connaissaient pas tous. Maintenant, je suis satisfaite, je peux couvrir mes dépenses grâce aux revenus générés et je fais même un petit bénéfice. Les autres membres de ma famille s’occupent de mon champ lorsque je m’occupe de mon étal. Ma position centrale, sur le bord de la route qui mène à Dehradun, m’assure une bonne visibilité et j’ai maintenant de nombreux clients réguliers. Mon objectif est d’augmenter mes revenus et de pouvoir ainsi aider les paysans de mon village à vendre leur production mais également de fournir aux familles qui viennent m’acheter des légumes un accès à une alimentation de qualité. Lorsque je vends les produits j’explique toujours aux clients l’importance de la nourriture issue de l’agroécologie et ils sont tous très intéressés. De même, suite à mon expérience de nombreuses paysannes du village et des villages alentours souhaiteraient démarrer à leur tour un petit étal de vente comme le mien ».
Des variétés locales particulièrement résilientes au changement climatique
Entre 10 et 15 variétés ont été identifiées par l’équipe locale et les paysannes du projet pour être testées et multipliées à la ferme expérimentale et dans les champs des paysannes pour évaluer leur résilience aux extrêmes climatiques. Phénomènes de plus en plus fréquents (variant entre sécheresses et inondations) Les équipes et les paysannes ont pu multiplier du riz, du blé, du ragi (millet), du maïs, différentes légumineuses et légumes. Durant la saison humide, du maïs, du millet, des lentilles, du riz, des citrouilles, des okras, loofa, et des haricots rouges ont été semées et récoltées dans les champs de 33 gardiennes de semences et à la ferme experimentale. Durant la saison sèche, des graines de blé et d’épinard seront testées et conservées. Les semences récoltées vont continuer à être testées et multipliées sur toute la durée du projet pour être distribuées au plus grand nombre.
De nombreuses formations données aux paysannes
67 paysannes ont été sélectionnées et formées pour devenir gardiennes de semences. Elles ont ainsi toutes appris à sélectionner, conserver et multiplier les semences. De plus, les paysannes de 11 villages (environ 268 femmes) ont été formées à la transformation alimentaire dans leurs propres villages et sont maintenant à même de cuisiner leurs propres pickles (légumes et fruits épicés marinés). Ces formations permettent aux bénéficiaires de conserver et de vendre plus facilement leur surplus mais également de réaliser des économies en fabricant ces produits elles-mêmes. Les paysannes du village Lower Charbha nous expliquent pourquoi elles ont rejoint le projet :
« Il est important pour nous de faire pousser notre propre nourriture à la maison. C’est meilleur pour notre santé de cultiver nos légumes sans produits chimiques, c’est également moins cher et nos produits ont plus de goût. C’est pour ces raisons que nous avons demandé à travailler avec le projet. Maintenant, nous cultivons 10 à 12 variétés de légumes et de plantes différentes chaque saison. Nous avons participé à des formations sur l’agriculture sans pesticides, sur la fabrication de pickles et sur l’importance pour notre santé de la nourriture sans produits chimiques. Maintenant, nous sauvegardons nos semences et n’en achetons quasiment aucune au marché.»
Création de groupes d’entraide
Cette année, après avoir suivi une formation comptable, 119 femmes ont rejoint 10 groupes d’entraide dans 10 villages. Ces groupes d’épargnes ont pour but de favoriser l’entraide entre paysannes et le développement d’activités génératrices de revenus. Parallèlement les 15 groupes d’entraide déjà constitués lors de la première phase continuent d’être appuyés et fonctionnent bien.
A propos de l’évolution de l’agriculture locale ces dernières années, les paysannes du village Lower Charbha déclarent :
« Nous avons un groupe d’entraide dans le village, nous sommes 13 membres et nous nous réunissons tous les mois pour mettre en commun 100 roupies chacune. Nous sommes intéressées par ce groupe pour plusieurs raisons : premièrement, cela nous permet d’avoir un moment de partage, le fait d’appartenir à un groupe nous permet de nous entraider lorsque c’est nécessaire ; deuxièmement, l’argent que nous récoltons nous permettra d’octroyer des prêts entre nous et réduira notre dépendance financière, et enfin, ce groupe pourra être l’occasion de travailler ensemble et à terme, si nous le pouvons, de commencer une activité génératrice de revenus ».
Sensibilisation du grand public
Le projet contient également un volet sensibilisation du grand public qui se traduit tout d’abord, par la formation des plus jeunes aux questions des semences, de l’agroécologie, de nutrition, sur le changement climatique et de gestion des déchets. Par exemple, 5 écoles (soit 243 élèves) ont reçu des kits de semences et d’outils afin que les élèves et leurs professeurs créent, avec l’aide des équipes locales de Navdanya, leur propre jardin potager. 3 écoles ont également organisé des rallyes pour sensibiliser leurs élèves à ces questions.
Ensuite, au fil de l’année, 6 festivals ont été organisés et ont permis de sensibiliser plus de 10 000 personnes à l’agroécologie et à la conservation des semences comme source d’autonomie et de résilience face aux changements climatiques. Plusieurs festivals organisés en 2016 ont également été l’occasion de valoriser les cultures locales. Comme le festival des légumineuses qui a eu lieu en janvier 2016. Pour cet événement, 57 paysannes de la région sont venues avec des semences traditionnelles rares de légumineuses telles que des fèves vertes ou noires, des haricots rouges ou de légumineuses Navrangi. Les femmes les ont cuisinées ensemble tout en discutant des problématiques actuelles autour de l’accès aux semences de légumineuses. Cela a permis aux participantes de prendre conscience de l’importance pour leur santé des légumes secs, riches en protéine et les a encouragées à conserver ce type de semences traditionnelles. Lors du festival de la Moutarde en février 2016, 55 autres paysan.ne.s (dont 47 femmes) se sont réunis pour échanger. La moutarde est une denrée très importante en Inde, consommée en épice et sous forme d’huile. Les semences traditionnelles de cette plante sont aujourd’hui menacées par la potentielle introduction de semences de moutardes OGM. Pourtant cette plante, en fixant l’azote dans les sols, a de nombreux bénéfices agroécologiques. Ce festival a ainsi permis de sensibiliser les paysan.n.es à l’importance de la conservation et de la production de moutarde locale ainsi qu’à la préservation de la biodiversité.
Un projet valorisé
Ces derniers mois, le projet a fait parler de lui à diverses occasions en Inde mais aussi à l’international. Ainsi, en novembre 2016, le projet « Graines de L’Espoir » a été lauréat des » 100 projets pour le climat « , initiative de la Ministre Ségolène Royal et du ministère de l’environnement français à l’occasion de la COP 22, qui s’est déroulée à Marrakech.
Toujours durant la COP 22, le projet a figuré dans la publication du prix Solutions Genre et Climat organisé WECF et la Women and Gender Constittuency (UNFCCC), grâce au soutien de l’Agence Française de Développement, de la Fondation RAJA-Danièle Marcovici et des Ministères des Affaires Etrangères français et néerlandais.
Cette première année de projet a permis de créer une base solide pour le développement d’un plan de sécurité économique, alimentaire, et écologique durable pour les paysan.ne.s et les communautés ciblés. Il s’agit désormais notamment de multiplier nos actions auprès des bénéficiaires pour qu’ils puissent s’approprier et bénéficier pleinement de la transition agroécologique, source d’autonomie et de résilience.
Article rédigé par le groupe bénévole: « Agroécologie & protection de la biodiversité » sur le suivi projet SOL
Pour en savoir plus sur le projet
Découvrez la première phase du projet
Découvrez le Vibe’s project qui met à l’honneur nos projets en Inde