Comment bloquer l’APE, destructeur de l’Afrique ?
Comment bloquer l’Accord de Partenariat Economique proposé par l’Europe et qui détruirait l’économie locale africaine?
Il ne nous reste que très peu de temps pour bloquer un processus poussé par Bruxelles qui mettrait en concurrence directe, et déloyale les produits européens subventionnés et les produits africains mis à disposition en circuits courts par de petites structures sur le sol africain. Rejoignez la mobilisation instiguée par SOL, Alternatives Agroécologiques et Solidaires et d’autres structures partenaires en signant la pétition qui sera envoyée en Août aux députés européen avant la prise de décision par la commission européenne.
Signer la pétition contre les APE
L’historique de cet Accord de Paupérisation Economique
Jusqu’à maintenant, l’Afrique de l’Ouest peut exporter librement ses productions – sans acquitter de droits de douane – vers le marché européen. En revanche les Etats ouest-africains conservent la possibilité de taxer les importations venant d’Europe.
L’Union européenne (UE) exige désormais la réciprocité : pour continuer à bénéficier du traitement préférentiel européen, l’Afrique de l’Ouest devrait supprimer ses droits de douane sur 82% des importations d’origine européenne.
Initié par l’Union européenne en 2000, l’Accord de partenariat économique (APE) est censé favoriser le développement économique et réduire la pauvreté en Afrique de l’Ouest. Mais en contraignant ces pays à supprimer la plupart de leurs protections commerciales vis-à-vis des importations de produits européens, c’est non pas leur compétitivité qui va s’accroitre mais toute la stabilité de leur économie qui est en péril, avec tous les impacts que l’on peut imaginer sur les structures les plus précaires.
Les objectifs commerciaux de l’UE ont ainsi pris le pas sur ceux de coopération.
L’APE servirait avant tout les intérêts d’une poignée de multinationales européennes au détriment des populations les plus vulnérables d’Afrique de l’Ouest.
Récemment, la Commission a prévu de supprimer le régime commercial préférentiel dont disposent le Ghana, la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Botswana, la Namibie et le Swaziland en octobre 2016.
L’objectif est de pousser les pays africains à ratifier les accords de partenariat économique (APE) qui doivent remplacer les préférences commerciales non réciproques accordées par l’UE
D’ici mi-juillet, la Commission prévoit d’adopter les 6 actes mettant fin au régime préférentiel et de faire voter les députés européens avant la fin de l’été pour acter la mise en place de l’APE.
Quels impacts sur le quotidien dans les pays africains ?
Le premier impact c’est la perte de droits de douanes pour les pays d’Afrique de l’Ouest qui atteindrait un cumul de 87 milliards d’euros en 2050.
Dans l’APE l’UE s’engage à supprimer ses subventions agricoles à l’exportation mais elle joue sur les mots, puisque ses subventions agricoles internes bénéficient aussi aux produits exportés qui le sont donc à des prix de dumping.(1)
Pour les pays les moins avancés d’Afrique, les accords de partenariat économique ne sont pas une bonne nouvelle, puisque les APE les obligent à ouvrir davantage leur marché aux exportations européennes, sans contrepartie.
En Afrique de l’Ouest, 12 des 16 pays font partie des pays les moins avancés (PMA)
L’APE mettrait ainsi en compétition la zone économique la plus riche avec une des régions les plus pauvres du monde : seuls 6 % des produits ouest-africains sont plus compétitifs que ceux de l’Union européenne (2)!
Il faut donc s’attendre à une hausse du chômage et à une baisse des salaires et revenus liées à la perte de compétitivité des productions locales.
La forte baisse des recettes fiscales réduirait d’autant les budgets consacrés à l’éducation, à la santé, aux petits agriculteurs et à la protection de l’environnement. D’autant plus que l’AO fait déjà face à trois défis structurels : démographique, changement climatique et déficit alimentaire. S’y ajoute depuis deux ans la chute des prix des matières premières (hors cacao).
Il est important de se rappeler que la revendication de la non ratification de l’APE est poussée par les pays africains qui sont en attente de l’appui de la société civile et des citoyens européens afin de bloquer ce projet à la commission.
Quels impacts pour l’Europe ?
On peut aussi noter des impacts négatifs sur le long terme pour l’Europe comme l’augmentation des immigrations illégales et une montée des extrémismes locaux en Afrique. Ce qui pourrait augmenter la pression actuelle mise sur l’Europe, qui commence déjà à être confrontée à ces sujets.
En insistant pour imposer l’APE, l’UE se tire une balle dans le pied en ne comprenant pas que, pour profiter à moyen et long terme de l’énorme marché que représentera l’AO pour l’exportation de ses produits et services à haute valeur ajoutée, il est indispensable de lui permettre d’assurer dans un premier temps sa souveraineté alimentaire et de protéger ses industries naissantes.
« Tous les pays qui se sont développés ont commencé par créer les conditions pour le faire en se protégeant et ce n’est qu’après qu’ils se sont ouverts aux autres. On ne peut demander aujourd’hui à l’Afrique d’être le premier exemple qui montrera que c’est en s’ouvrant d’abord au commerce qu’elle va se développer ».
Mamadou Cissokho, président honoraire du Réseau des organisations paysannes et des producteurs agricoles d’Afrique de l’Ouest (ROPPA)
Mais alors quelles autres propositions ?
Il est tout à fait possible dans un cadre juridique légale de rester sur le mode de fonctionnement actuel qui permet aux pays d’Afrique d’exporter vers l’UE à des tarifs préférentiels, dans une logique de solidarité, sans réciprocité pour les produits européen importés en Afrique. Compte tenu du passif de l’Europe sur les ressources naturelles africaines et des nombreuses actions remettant en question la notion de souveraineté, c’est même une question d’éthique.
Il n’est pas trop tard pour agir
En Europe, le Parlement européen a prévu de voter sur la ratification de l’APE en septembre 2016. Il est urgent d’agir et de se mobiliser dès maintenant pour demander un vote contre l’Accord. Les eurodéputé-e-s ont une dernière chance de stopper l’Accord, qui est une menace pour la souveraineté alimentaire et économique de l’Afrique de l’Ouest et qui est synonyme d’appauvrissement pour des milliers de familles africaines.
Rejoignez la mobilisation de la société civile ouest africaine et demandez aux eurodéputé-e-s
– de voter NON à la ratification de l’APE entre l’Union Européenne et l’Afrique de l’Ouest.
– de maintenir la liberté d’accès des produits ouest africains sur le marché européen, sans réciprocité.
Signer la pétition contre les APE
- Consulter l’article de synthèse par Jacques Berthelot L’APE UE-Afrique de l’Ouest, un accord perdant-perdant
- Consulter les articles analytiques de Jacques Berthelot sur les APE
(2) Centre Sud, « The EPAs and risks for Africa: local production and regional trade”, juin 2012, p. 3